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LA PERSECUTION RELIGIEUSE.

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La loi d'annexion du 1 octobre 1795 mit en vigueur chez nous les lois françaises, la Constitution française et l'an III. Le Directoire pratique une politique jacobine et sectaire particulièrement pénible à supporter pour nos ancêtres chrétiens. Il s'en prit d'abord aux communautés religieuses, au clergé séculier. Le 6 novembre 1796, tous les biens meubles et immeubles des communautés religieuses furent confisqués au profit de l'état, « propriété nationale. » Le 11, les communautés elles-mêmes étaient déclarées dissoutes, les religieux devaient « évacuer » leur couvent, et ne pouvaient plus porter le costume religieux: on leur donnaient pour vivre un bon de 15 000 livres que beaucoup refusèrent. Les moines de St Hubert durent donc « évacuer », se disperser, chercher asile chez des parents ou amis. Les Carmélites, universellement aimées à Rochefort, à cause de leur vie exemplaire et de leurs abondantes aumônes, ne voulaient pas évacuer. L'autorité républicaine prétendait briser les chaînes de malheureuses, enfermées, affirmait-on, contre leur gré. La population de Rochefort s'émut. Le 15 décembre, deux Rochefortois, Deloncin et Crépin, parcoururent la localité pour faire signer une pétition demandant le maintien du couvent des Carmélites. Tous signent, sauf Poncelet, son beau-père Collard, ... et un certain Hardenne. Ce fut en vain. Le 9 janvier 1797 est le jour fixé pour l'évacuation, les Carmélites restent et s'enferment dans leur couvent. Le 10, Poncelet, accompagné de la gendarmerie, arrache les Carmélites une à une de leurs cellules. Elles se virent forcées de chercher place à droite, à gauche. Heureusement, celles qui trouvèrent celles qui trouvèrent un accueil cordial et une bienveillante hospitalité. (Deux moururent à Bure et y furent enterrées au début des années 1800) Leurs biens furent vendus. L'abbaye de St Hubert, l'abbaye d'Orval avec toutes leurs terres, leurs bois, leurs fermes. Certains crurent s'enrichir en rachetant à vil prix ces biens volés sur lesquels les honnêtes gens ne faisaient aucune hausse. « Bien mal acquis ne profite pas. » La malédiction de Dieu s'est abattue sur ces acheteurs de « biens noirs », sur leur fortune, sur leurs descendants. La ferme et le château de Bure furent achetés par Denis Charlier.
Après le clergé régulier, c'est le tour du clergé séculier, des curés. Frappés dans leurs revenus, par la suppression des dîmes, ils étaient dans une situation fort précaire. Ils ne touchaient aucun traitement. Et dans bien des villages, on en était réduit à faire des collectes de grains pour eux. La persécution va aller crescendo. Le 1 septembre 1796, ils doivent remettre à Rochefort les registres des baptêmes, mariages, décès. C'est désormais l'autorité civile qui tiendra les registres de l'état civil. Aux archives de Namur, on retrouve nos vieux registres paroissiaux. On voit qu'ils sont clos le 24 fructidor, an IV. Le 26 fructidor, H. Pigeon, agent de la commune de Bure élu pour recevoir les actes destinés à constater les naissances, mariages et décès des « citoyens » commence ses fonctions. Le calendrier républicain remplace jusqu'en 1805 le calendrier grégorien. L'an I commence le 22 septembre 1792. Si l'année a toujours douze mois, avec des noms différents, la semaine, elle, comprend dix jours, de primidi à décadi. C'est un crime de travaille le décadi et de se reposer le dimanche. Pour remplacer les fêtes religieuses on institue des cérémonies laïques. (Rien de nouveau). D'insipides cérémonies en l'honneur de la Nature, ou du Genre humain. « Ces êtes officielles, célébrées par la canaille seulement, dégénéraient en scènes de licence. » (Van Kalken)
A Rochefort, l'église des Carmélites sécularisée fut consacrée au « Culte de l'Être Suprême. » Elle servit donc de temple laïc au canton de Rochefort, et là sur l'autel profané, fut installée la déesse Raison; la femme d'un gendarme jouait ce rôle burlesque et sacrilège.
L'arrêté du 19 fructidor an V dépasse toute mesure. Les curé doivent faire devant l'administration municipale la déclaration suivante: « Je jure haine à la Royauté et à l'Anarchie et fidélité à la République et à la Constitution de l'an III. » Le port de l'habit religieux est défendu sous peine d'une amende de 100 à 500 livres et d'un emprisonnement d'un mois à deux ans. Aucun signe du culte ne peut être fixé sinon dans les églises ou dans les maisons particulières. Partout ailleurs l'autorité municipale doit les faire enlever. (croix des chemins.) A Bure: - pierre tombale burinée – cloches cassées, croix abattue – Hérin de Tellin et Poncelet estiment l'église avec un cimetière d'environ 50 verges, une chapelle dénommée N.D. de Harre, et plus connue sous le nom de N.D. de Bure, pour 240 frs. -vente du domaine, presbytère – Archives de Bure: dépenses de la commune payées apr Louviaux, agent de la Commune: « Le 13 ventôse an 6, payés aux ardoisiers de Rochefort quatre couronnes de France, pour avoir mis la croix du clocher bas, et une demi couronne pour des fournitures tant pour trois pots de bière que des ardoises et clous qu'on a mis sur la toiture de l'église, 21 florins, 18 patars, 3 livres. De même pour avoir mis la croix du clocher bas, 6 frs la deuxième fois.
C'est le 26 septembre 1797 que l'arrêté fut connut à Rochefort. Les curés en grand nombre considérèrent ce serment comme une apostasie. Presque tous refusèrent de le prêter. Ils ont six jours pour se décider dans la municipalité de Rochefort. Journal de l'abbé Hérin, curé de Humain: « Pendant les six jours qui précédèrent la mise en vigueur de la loi, la foule remplissait les églises, comme si c'était pour la dernière fois de la vie; on faisait bénir de l'eau par tonnes; tous fondaient en larmes. » Le curé Godenne de Rochefort prête le serment, celui de Villers/Lesse également.
Notre curé Swolfs, le curé de Tellin, de Resteigne, etc. refusent.  Les voilà donc insermentés. Dès le 5 octobre, le commissaire P. s'empare des clefs de l'église dans les paroisses possédant un curé récalcitrant. Plus de messe, plus de prédication, ni le dimanche ni les autres jours. Nos gens de Bure vont prier à N.D. de Hare. En Belgique, presque tous les prêtres refusent le serment. Menacés de la déportation, ils célèbrent en secret des « messes aveugles » suivis mentalement par les fidèles silencieux groupés sur les places publiques. Ils se cachaient chez des particuliers, dans les bois. C'était dans le plus grand secret qu'ils baptisaient ou administraient les sacrements aux moribonds. Ils pouvaient être dénoncés par un mouchard, un judas et être condamnés.
La Directoire fit alors enlever les images sacrées et les croix des rues. Pas un seul crucifix si nombreux dans les carrefours, aux gués des rivières, aux bords des chemins, pas une image de la Ste Vierge installée dans le creux d'un vieux chêne, ne put échapper aux démolisseurs de croix. Au commencement de 1798, le commissaire P. abattit les croix dominant les églises. Une loi spéciale ordonne le brisement des cloches; en février 1799, il n'existe plus une cloche dans le canton de Rochefort. Nos cloches brisées en 1799, nous restons sans cloche. - En 1804, le 31 de mai, la commune achète une vieille cloche de 1639 livres pour cent louis d'or. Cloche d'un monastère qui avait été confisquée par la Révolution française. Elle datait de 1656. cette cloche était fêlée. Le 13 octobre 1843, convention entre Jean-Joseph Pigeon, bourgmestre et conseiller de fabrique et François Louveaux, conseiller de fabrique de Bure, et les Causard de Tellin. Les Causard reprennent  la cloche fêlée et en refonderont deux ( 800 k et 500 k) 2980 frs. Ces cloches furent faites à Tellin le 20 octobre 1843. La charpente des cloches fut réparée en 1889 (lors d'un ouragan), (date marquée par les ardoises du clocher).
Enfin le 8 mars 1798, fut consommée une nouvelle spoliation: tous les biens du clergé, sauf ceux des assermentés, furent confisqués, déclarés biens nationaux, furent vendus aussitôt pour devenir la proie des spéculateurs.
L'administration centrale de Namur décide le 22 août 1798, à la suite des évènements de Villers sur Lesse du 11 juin 1798, que les réunions de « fidèles pour prier sont interdites, et que les particuliers qui tiendraient chez eux de pareils rassemblements devraient être poursuivis comme auteurs d'attroupements séditieux. Les curés insermentés qui étaient attrapés étaient traînés devant les tribunaux républicains, condamnés à la prison, à la déportation. On les déportait à l'Île de Ré, à l'Île d'Oléron, terres inhospitalières battues par les flots de l'océan Atlantique. Ils souffraient beaucoup de toutes sortes de privations. Plusieurs y périrent de misères dans les casemates des îles de Ré ou d'Oléron. (Lamotte page 500) On en compte dans le département de Sambre et Meuse 884 qui furent emprisonnés dont un bon nombre déportés, qui subirent ce traitement rigoureux: Brialmont, né à Havelange, curé doyen de Wellin arrive à l'île d'Oléron le 29-3-99; Laffineur, curé de Han-sur-Lesse, déporté à Oléron, revint en juillet 1799; Thiry, curé de Jamblinne, mourut à son retour d'exil en arrivant à Rochefort.
Tous les prêtres restés au pays se cachaient. Le dimanche, ils disaient la messe avant l'aube dans une maison amie et sûre, sous la garde d'une sentinelle prête à signaler l'approche des gendarmes. Pendant la semaine, habillés en cultivateurs, en bucherons, ils essayaient de dépister les gendarmes. La nuit, ils reprenaient leur rôle de pasteur pour baptiser, confesser, administrer. Parfois, pour échapper à des recherches plus serrées, ils cherchaient asile dans les bois, dans les cavernes. Cela dura en 1798 et 1799 jusqu'au coup d'état de Napoléon qui mit fin au Directoire. La findu Directoire fut très sombre. Ce gouvernement composé d'incapables, de sectaires et de noceurs étaient tombé dans une déchéance morale profonde. Chez nous la misère, la disette, les épidémies rappelaient le « siècle de malheur. » Les routes étaient infestées de brigands masqués, surnommés chauffeurs et garotteurs « flambaient les pieds de leurs prisonniers pour les forcer à révéler leur argent. » A ces maux s'étaient ajoutées les souffrances morales de la persécution. Aussi Napoléon Bonaparte s'emparant du pouvoir fut accueilli comme un libérateur.

Notre Curé, l'Abbé Swolfs


  a) Nous lisons dans sa lettre de faire-part qu'il ne cessait... d'instruire les fidèles, de les exhorter à la piété, à se méfier de toutes les nouveautés profanes, des maximes du monde, et surtout des prétendues lumières du siècle.
Son attachement à notre sainte Religion fit que dans les temps mauvais et orageux,pour y rester fidèle, il se retira dans les bois où il souffrit toutes sortes de privations. A portée de ses chers paroissiens, il volait à leur secours dans le besoin pour ne leur laisser manquer aucun moyen de salut. Caché tantôt chez l'un, tantôt chez l'autre, protégé par l'admirable discrétion des gens, M. Swolfs administrait les sacrements en cachette. Le nom de ceux qui l'hospitalisèrent au péril d'être punis par les Révolutionnaires, n'est venu jusqu'à nous, malheureusement. Mais nous voyons dans le dossier du douaire, que M.Swolfs a dû conciliabuler avec Pigeon, D.Charlier, Eloy.
  b) Dans le registre des baptêmes on voit souvent l'Abbé Swolfs administrer le baptême et être en même temps le parrain, la marraine est presque toujours Marie-Catherine Grommelière sage femme à Bure, épouse de Jacques Rondeaux, native de la paroisse St Remacle à Liège. Nous voyons ainsi: François Eugène Noël, fils de Nicolas Noël et Marie Anne Rondeaux, - Célestin Limet, fille de Remy Limet et Jeanne Josèphe Despas, - Catherine Noël – François Joseph Petit – Marie Françoise Wéber, etc. La situation empire en 1799 à cause de la conscription militaire et de la loi des otages. M. Swolfs semble disparu. Nous voyons les baptêmes suivants administrés soit par M. Georges, vicaire de Grupont, ou bien par M. Remacle, vicaire de Bure.

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